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quatorze pieds de large et six de profondeur, et le camp fut dressé à côté du village de Tchikoummbi, sous-chef de Mona Pého.

Il y eut là un jour d’arrêt que la caravane d’Alvez employa à se procurer des vivres, et qui, pour mes gens et pour moi, fut la cause d’un petit extra de jeûne.

Autour de nous, les bêtes bovines étaient nombreuses, des bêtes sans bosse, de taille moyenne et à robe généralement noire et blanche. Bien que les indigènes eussent des vaches depuis longtemps, l’art de les traire leur était inconnu. Les chèvres et la volaille abondaient ; mais trop pauvre pour en acheter, je dus me contenter de miel et de cassave.

D’après Tchikoummbi, les communications étaient interrompues entre Bihé et la côte. On rapportait que des marchands, dont les caravanes réunies formaient un corps de six mille hommes, n’avaient pas réussi à forcer le passage. Alvez l’avait appris, disait-il, des gens que nous avions vus la veille, et tenait le fait pour authentique. Il le racontait par le menu avec tant de précision, il l’affirmait si positivement, que j’en conclus à priori que l’histoire était fausse : entre Benguéla et Bihé, il se faisait un commerce considérable, et où il y a trafic, il y a des routes.

Mona Pého demeurait à peu de distance ; mais Alvez décida qu’on n’irait pas le voir :

« Cette visite nous prendrait deux ou trois jours ; puis il y avait là des gens de Bihé détenus par le chef ; si l’on apprenait, disait-il, que j’ai vu Pého sans faire relâcher les captifs, les amis de ces derniers pilleraient mon établissement. »

Et, après cette déclaration formelle, nous allâmes tout droit chez Pého.

Deux heures de marche nous firent gagner un gros village, dont le chef, appelé Mona Lammba, nous dit qu’avant d’aller plus loin, nous devions attendre qu’il eût informé son maître de notre approche.

Ce vassal de Mona Pého était un beau jeune homme, paré d’une veste de drap bleu avec galons de caporal, et d’un jupon de drap rouge. Bien qu’il nous eût arrêtés, il n’en fut pas moins très poli et m’invita, ainsi que quelques autres, à venir dans sa case. Lorsque nous fûmes assis, il prit une énorme gourde remplie d’hydromel, et m’en versa une pinte que je bus d’un trait,