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L’endroit fut découvert et la chèvre mise à la broche. Assis près de la flamme, le dos appuyé contre un arbre, j’essayai de manger un peu de viande ; mais la fatigue empêcha les morceaux de passer. Quant à mes compagnons, ils eurent bientôt expédié la bête.

Aux premières lueurs de l’aube, nous étions en marche. Bientôt nous rencontrâmes des gens que Dillon avait envoyés à notre recherche. Une heure après j’avais gagné le camp, où je me traînai vers mon lit ; car cette nuit passée en plein air, et dans un endroit insalubre, m’avait donné la fièvre.

Pour ajouter à mon ennui, j’avais découvert que si, au lieu d’écouter Bombay, j’avais suivi la direction que je voulais prendre, nous aurions été de retour le soir même.

En arrivant j’étais loin d’avoir le même aspect qu’au départ. Jaquette et pantalon étaient mouillés, déchirés, couverts de boue ; mon voile avait déteint ; et la figure, le casque et les épaules étaient d’un vert pois uniforme.

Une escouade avait été envoyée au sud du Kinngani pour chercher des vivres ; elle revint au bout de trois jours, n’ayant trouvé que du manioc et seulement pour une journée.

Pendant que nous étions là, Robert Moffat nous apporta des lettres du docteur Kirk et d’autres personnes de Zanzibar, ainsi que nos dépêches d’Europe. Il nous donna en même temps des nouvelles de Murphy. Ce dernier était presque entièrement rétabli ; il avait fait abandonner le camp de Chammba Gonéra, et tout le monde était avec lui à Bagamoyo.

Robert n’en pouvait plus ; cette course l’avait exténué. Je lui fis prendre un âne pour retourner auprès de Murphy ; il nous quilla et nous repartîmes.

À nos trois jours de repos succédèrent trois jours de marche dans une contrée qui ressemblait à un parc : un ensemble de prairies avec des bouquets d’arbres, çà et là de petits étangs, de petits bassins où croissaient de beaux nénuphars à grandes fleurs blanches, d’autres à fleurs bleues ; et, dans l’herbe, des lis blancs de toute beauté.

J’avais toujours la fièvre ; tant que durait la marche, je parvenais à rester sur mon âne et à me conserver les idées nettes ; mais arrivé au camp j’étais pris de délire et ne pouvais pas rester debout.

Pendant ce temps-là, Dillon avait toute la peine ; il était seul