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claves ; il avait reçu en échange l’autorisation de frapper un droit sur toutes les caravanes qui passeraient chez lui, caravanes parties de n’importe quel point de la côte, excepté de Vhouinndé.

Cet incident montre combien le sultan de Zanzibar a peu d’influence sur ses sujets de la terre ferme, et combien il lui est difficile, même avec les meilleures intentions du monde, de supprimer la traite de l’homme dans ses provinces continentales.

Dillon, à son tour, alla voir le chef, qui fut très-courtois et fixa le mhonngo à trente dotis (soixante brasses de cotonnade).

Le jour suivant, après une marche d’une heure et demie, nous nous arrêtâmes à la porte de Msouhouah. Six ou huit grandes huttes bien construites et bien tenues formaient tout le village mais il y avait une autre bourgade dans la jungle voisine.

Tous ces hameaux, bâtis en pleine jungle, n’ont d’autre accès qu’un chemin tortueux, sentier fort étroit d’une fermeture facile, et en cas de guerre ils deviennent imprenables avec les faibles moyens dont l’ennemi dispose. Grâce à leurs forteresses, les gens de Msouhouah peuvent chasser l’esclave sur les terres du voisinage sans crainte de représailles, et les marchés de la côte leur assurent le placement des victimes.

La famine, disait-on, sévissait en face de nous ; il fallait acheter des vivres. L’aimable chef, assurant qu’il serait dangereux pour nos hommes d’aller à la recherche des provisions, offrit d’y envoyer ses propres sujets ; il ne demandait en échange de ce service, qu’à toucher d’avance le prix des denrées. Quand l’obligeant personnage eut reçu l’étoffe, il trouva de nombreuses excuses pour ne pas tenir sa promesse ; et après cinq jours d’attente il nous fallut partir, n’ayant de vivres que pour quatre repas.

Quelques chefs du voisinage profitèrent de ce délai pour venir réclamer le tribut. Je fus assez fou pour donner à l’un d’eux qui s’appelait Mtonnga, soixante brasses de cotonnade (méricani et kaniki) et sept brasses d’étoffe de couleur ; Bombay n’avait persuadé que ce chef demeurait sur notre passage et nous susciterait de grands embarras, si nous refusions de le satisfaire. Je découvris plus tard que le village de ce fourbe n’était pas sur la route que nous suivions, mais au nord de celle-ci, et un peu derrière nous. Un autre, un appelé Kasouhoua, ne demanda rien moins que deux balles d’étoffe ; je découvris heureusement que nous l’avions déjà passé.