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gré cela, cette malheureuse affaire nous arrêta pendant trois jours, et nous coûta trois balles d’étoffe. Je dus encore m’estimer heureux d’en être quitte à si bon marché ; maints traitants ont payé beaucoup plus cher leurs conflits avec les Vouaségara, et ces conflits n’avaient pas pour motif la mort d’un homme.

Par une caravane, arrivant de l’Ounyanyemmbé, caravane qui se rendait à la côte, j’envoyai nos dépêches, ainsi que la Bible et la montre de Moffat, plus un vieux raïfle qui avait appartenu au grand-père de celui-ci. De Zanzibar, ces objets devaient être expédiés à la mère de notre pauvre ami, qui habitait Durban.

Trois caravanes montantes arrivèrent aussi pendant notre séjour à Mouinyi Ouségara ; elles se joignirent à nous, afin de profiter de l’avantage que donne le nombre, dans la traversée de l’Ougogo. L’une était composée de Vouanyamouési, rapportant chez eux le prix de l’ivoire qu’ils avaient été vendre à Bagamoyo. À Réhenneko, où ils avaient passé après nous, le chef de l’endroit les avait attaqués ; et d’après leur récit, dont il faut, je crois, beaucoup rabattre, ils avaient perdu huit ou dix des leurs et cinquante ou soixante charges de marchandises.

La seconde bande, formée d’une vingtaine d’individus, appartenait à un forgeron qui nourrissait l’espoir de faire fortune dans l’Ounyanyemmbé, en y réparant les mousquets employés contre Mirammbo.

Enfin, la troisième de ces caravanes, et la plus nombreuse, était un assemblage hétérogène de petits groupes ayant pour chefs des serviteurs d’Arabes ou appartenant à des hommes libres, qui n’employaient que deux ou trois porteurs, leurs propres esclaves ; petites gens, mais qui, pleins d’espoir, avaient mis le cap sur des pays d’une richesse fabuleuse, « où les dents d’éléphant servaient à faire des clôtures et des jambages de porte[1]. »

Bref, le 11 juin, quand nous partîmes, nos bandes réunies constituaient une force de plus de cinq cents hommes.

Le chemin était rocailleux et raviné ; et en différents endroits, qui surplombaient la rivière, il était percé de trous, cachés par des broussailles ; d’où la nécessité de faire la plus grande atten-

  1. Cette richesse, bien diminuée alors, avait été réelle, et à une époque récente. Voyez ce que dit Stanley du prix de l’ivoire dans le Manyéma en 1871. (Comment j’ai retrouvé Livingstone, p. 362.) (Note du traducteur.)