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ne pouvais pas la saisir. Elle venait de lointains pays, son désir répondait au mien, quelque chose nous séparait… Je ne sais… Peut-être, refermant les yeux et touchant la fraîcheur de ton corps, en ressaisirais-je l’illusion, et si tu m’as souhaité, toi que mon caprice éveillé repousserait, hâte-toi de prendre la place d’une ombre dans le sommeil abusé de Sparyanthis, viens et tais-toi… »

Mais l’esclave soupira et dit :

« Ô mon maître, je suis tienne, dédaignée ou choisie. L’ordre des heures m’a seul fait oser une présence que la crainte eût défendue à mon désir : car ne repousses-tu pas de plus belles et de plus dignes, qui, comme moi, souffrent de ton orgueil et baisent ton souvenir sur les lèvres qui les violentent ? Le prince Cimmérion s’approche, l’armée touche aux portes, et c’est pourquoi je suis ici avec la lampe de bronze et la fiole d’or.

— J’attendais en rêve une femme, s’écria Sparyanthis, mais les dieux me réservaient une autre joie ! Voici que revient mon frère bien-aimé, le fort guerrier, dont la poitrine brune se couvre des écailles de bronze et dont la tête secoue la fauve aigrette d’or et de plumes au-dessus des foules de la guerre ! Qu’on me revête de mes soies les plus belles, que mes joyaux, du diadème aux chaussures, me fassent tout scintillant de rosée, et