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d’avoir au moins connu la saison de son désir. Car n’êtes-vous point désiré de toutes vos sujettes ? ajouta-t-elle avec ironie. Combien d’entre elles, jeunes filles de haut rang, vivant libres dans les palais de vos dignitaires, destinées à enrichir les demeures de capitaines glorieux ou de savants renommés, échangeraient avec joie le patriciat contre l’honneur d’être esclaves en vos sombres portiques, attendant l’heure de dissiper votre ennui et de parfumer votre sommeil ! Toutes, assurément, vous pensent le plus beau des Étésiens. Mais dites-moi, prince, si cette jeune femme, le jour où elle vous éveilla, vous annonçant la bonne nouvelle, ne brisa pas en vous le spectacle d’un songe ? Il me semble que votre frère m’a parlé d’une telle circonstance…

Sparyanthis, troublé, considéra l’impénétrable visage d’Alilat, et répondit :

— Je rêvais, en effet, un songe d’amour me visitait. Peut-être sans m’en douter, la présence de cette esclave me le suggérait-elle…

— N’était-ce pas plutôt, dit alors Alilat avec une expression mystérieuse et menaçante, n’était-ce pas plutôt, Sparyanthis, mon propre visage qui vous apparaissait, alors que je revenais bientôt épouse mais pourtant captive encore, dans une litière, parmi le dur cliquetis des armes ? Alors que j’attendais de voir paraître à la suprême terrasse de ce gigantesque palais votre