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frêle silhouette d’or saluant le retour fraternel, n’était-ce pas déjà mon image qui venait à votre rencontre, et, heureuse, vous souriait dans le sommeil ? Pourquoi mentir, ô Sparyanthis ! Pourquoi même me répondre et m’interroger davantage, et me demander comment j’ai pu savoir ce secret ? Je suis d’une race qui comprend les arcanes et dispose des puissances, et si mon image vous parvint, c’est que je le voulus. Sortie de moi, Sparyanthis, elle s’est attachée à votre âme et malgré vous elle s’interposera dans vos baisers, car nous sommes de même sang, ô Sparyanthis, du sang des divinateurs, et la conquête de votre frère n’a fait que nous joindre, et c’est pour m’amener à vous qu’il a combattu !

— Oubliez-vous, dit Sparyanthis irrité, que vous êtes la femme de mon frère, et que d’un mot… Qu’il me suffise de répondre que je ne vous aime pas. Oui certes je vous ai vue en songe, et j’ai menti pour rassurer mon frère ; mais vous n’oserez révéler cette imposture, et ainsi s’anéantira votre orgueil. Au reste, Alilat, vous êtes trop belle et trop profonde pour qu’entre nous subsiste un vain ressentiment, et vous savez bien que vous ayant désirée en songe, je n’ai que faire de votre réalité : car aux êtres ennuyés et suprêmes que nous sommes, lassés d’avoir tout obtenu, la réalité est le décor imparfait des songes.

— Insensé, dit Alilat brusquement, tu m’as désirée,