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en rêve, mais tu ne m’as pas eue, et ton désir me vengera de ton ennui, et tu n’oseras pas l’avouer à ton frère.

— J’aime mon frère Cimmérion, dit Sparyanthis.

— Mais nous sommes faits l’un pour l’autre, au-dessus de cet esprit grossier qui ne comprend que la force des armes, et tu le sais, ô Sparyanthis, ô jeune homme inspiré par le vieux génie subtil, violateur et triste de mon Orient !

Le prince Sparyanthis frémit, mais déjà Alilat s’était levée, et, s’inclinant devant lui avec l’afféterie des saluts rituels, long serpent noir et violacé traînant ses replis de satin, elle s’éloignait parmi les porteurs de parasols, dans l’ombre des cyprès de bronze, tandis que la considérait Sparyanthis, soucieux et pâle, environné des blanches nudités des jeunes hommes et des femmes. Et c’était comme si toutes les blancheurs secrètes du corps d’Alilat s’étaient matérialisées et demeuraient sur ses traces, vains simulacres, ébauches imparfaites d’une beauté qu’elle entraînait au rythme de sa démarche impérieuse, au secret ondoyant de ses robes closes. Et au moment où elle disparaissait dans l’ombre des dômes de feuilles noires, l’eau du bassin se teignit du sang surnaturel du crépuscule, mourant au ciel qu’interceptaient les ramures.

Désormais une pensée vécut avec Sparyanthis, et se