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tion posée dans l’invisible était restée en suspens au bord de la réalité, et c’était la réponse qu’y apportait la vivante présence d’Alilat apparue au milieu des armées, sur la clameur triomphante des trompettes, dans le faste des étendards, aux bras d’un autre que le rêve n’avait pas choisi. Elle le savait, et cette connaissance était comme un aimant qui saisissait l’esprit de Sparyanthis et le tirait vers elle hors de sa chair. Désormais Alilat, par delà les portiques et les vastes détours des parcs, fut comme une pierre d’aimant, cachée mais irrésistible. Femme, il l’eût dédaignée ; symbole d’une volonté divine et fatale, il la souhaita comme il avait pendant tant de nuits astrologiques souhaité l’inconnu dont elle se révélait un des pôles. Il usa vainement ses désirs sur de jeunes chairs dociles. Elles lui semblaient des fruits savoureux. Mais sur l’allégement de la volupté, dans les heures lassées de l’après-midi, le fantôme d’Alilat flottait, plus tyranniquement spirituel. Les incantations qu’il essaya échouèrent. Plusieurs fois, l’ayant suscitée aux miroirs où l’apparition d’un visage annonce la mort prochaine de l’être qui le montre, il vit s’ébaucher la silhouette de la magicienne, mais les miroirs se fendirent, et il perçut une sorte de ricanement ironique. Ayant dessiné, par la force de sa science, la courbe de cette existence détestée, et ayant tenté de la confondre aux linéaments qui