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LES BELLINI.

Vierge entre saint Paul et saint Georges et la Vierge entre sainte Madeleine et sainte Catherine, toutes deux à l’Académie. Ce dernier tableau est surtout remarquable par la richesse de son coloris : il est baigné par une lumière d’or qui semble émaner des trois visages de femmes en prière.

Quant aux Madones isolées de la fin du xve siècle, elles ne s’écartent pas de la formule bellinesque, sauf que la Vierge apparaît fréquemment assise devant la balustrade, tenant l’Enfant sur ses genoux. Un écran d’étoffe l’isole le plus souvent du paysage du fond. Le type est le même qu’aux Frari : yeux bruns, carnation de blonde, « le nez menu », la bouche étroite[1].

J’ai hâte d’en venir à l’Allégorie Chrétienne des Offices (p. 117), ce chef-d’œuvre longtemps méconnu que la critique place aujourd’hui au tout premier rang des créations de Giovanni, à côté de la Pietà de la Brera. Même lorsqu’on fut d’accord pour admirer la fantaisie du paysage, la richesse du coloris, l’atmosphère de rêve que dégage ce petit tableau, le sujet n’en resta pas moins une énigme indéchiffrable. Ce n’était pourtant, comme l’a très bien montré récemment G. Ludwig, que l’illustration d’un poème français, très populaire au moyen âge : Le Pèlerinage de l’âme par Guillaume Deguilleville. La terrasse, enclose d’une barrière de marbre — que nous avons déjà remar-

  1. Il se retrouve au Musée de Berlin (avec l’Enfant debout), à l’Académie de Venise (l’Enfant assis sur les genoux devant un paysage et Madonna degli Alberetti) et à Londres (National Gallery et Coll. Mond).