Page:Campan - Mémoires sur la vie privée de Marie-Antoinette, tome 1.djvu/10

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simplicité fut, je crois, le premier et peut-être le seul des torts qu’on lui reproche[1]. »

Ce prestige une fois dissipé, mademoiselle Genet vit mieux sa position : elle n’avait rien d’attrayant. La cour de Mesdames, éloignée des plaisirs bruyans et licencieux que recherchait Louis XV, était grave, méthodique et sombre. Madame Adélaïde, l’aînée des princesses, vivait beaucoup dans son intérieur : madame Sophie était fière ; madame Louise était dévote. Les tristes plaisirs de l’orgueil, ou les pratiques d’une dévotion minutieuse, ont peu d’attrait pour la jeunesse. Mademoiselle Genet cependant ne quittait pas l’appartement de Mesdames, mais elle s’était plus particulièrement attachée à madame Victoire. Cette princesse avait été belle : sa figure exprimait la bonté, sa conversation était douce, facile et simple. Mademoiselle Genet lui inspirait ce sentiment qu’une femme âgée, mais affectueuse, accorde volontiers aux jeunes personnes qu’elle voit croître sous ses yeux, et qui possèdent déjà des talens utiles. Des journées entières se passaient à lire auprès de la princesse qui travaillait dans son appartement. Mademoiselle Genet y vit souvent Louis XV. Dans le cercle de ses amis intimes, elle aimait à raconter l’anecdote suivante.

« Un jour au château de Compiègne, disait-elle, le roi interrompit la lecture que je faisais à Madame. Je me lève, et je passe dans une autre chambre. Là, seule dans une pièce qui n’avait point d’issue, sans autre livre qu’un Massillon, que je venais de lire à la princesse, légère et

  1. Nous placerions ici même une réponse à ce reproche, s’il ne devait se trouver repoussé plus bas dans la Notice, et surtout dans les notes qui accompagnent les Mémoires.