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Page:Campan - Mémoires sur la vie privée de Marie-Antoinette, tome 1.djvu/100

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Lorsqu’on eut entièrement déshabillé madame la dauphine, pour qu’elle ne conservât rien d’une cour étrangère, pas même sa chemise et ses bas (étiquette toujours observée dans cette circonstance), les portes s’ouvrirent ; la jeune princesse s’avança cherchant des yeux la comtesse de Noailles, puis s’élança dans ses bras, en lui demandant, les larmes aux yeux, et avec une franchise qui partait de son cœur, de la diriger, de la conseiller, d’être en tout son guide et son appui. On ne put qu’admirer cette marche aérienne : on était séduit par un seul sourire ; et dans cet être tout enchanteur, où brillait l’éclat de la gaieté française, je ne sais quelle sérénité auguste, peut-être aussi l’attitude un peu fière de sa tête et des épaules, faisait retrouver la fille des Césars.

En rendant justice aux vertus de la comtesse de Noailles, les gens sincèrement attachés à la reine ont toujours regardé comme un de ses premiers malheurs, peut-être même comme le plus grand qu’elle pût éprouver à son entrée dans le monde, de n’avoir pas rencontré, dans la personne naturellement placée pour être son conseil, une femme indulgente, éclairée, et unissant à des avis sages cette grâce qui décide la jeunesse à les suivre. Madame la comtesse de Noailles n’avait rien d’agréable dans son extérieur ; son maintien était roide, son air sévère. Elle connaissait parfaitement l’étiquette ; mais elle en fatiguait la jeune princesse sans lui en démontrer l’importance. Toutes ces formes étaient