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gênantes à la vérité ; mais elles avaient été calculées sur la nécessité de présenter aux Français tout ce qui peut leur commander le respect, et surtout de garantir une jeune princesse, par un entourage imposant, des traits mortels de la calomnie. Il aurait fallu faire sentir à la dauphine qu’en France sa dignité tenait beaucoup à des usages qui n’étaient nullement nécessaires à Vienne pour faire respecter et chérir la famille impériale par les bons et soumis Autrichiens. La dauphine était donc perpétuellement importunée par les représentations de la comtesse de Noailles, et en même temps excitée par l’abbé de Vermond à tourner en dérision et les préceptes sur l’étiquette et celle qui les donnait. Elle écouta plutôt la raillerie que la raison, et surnomma madame la comtesse de Noailles : madame l’Étiquette. Cette plaisanterie fit présumer qu’aussitôt que la jeune princesse agirait selon ses volontés elle se soustrairait aux usages imposans[1].

  1. Madame la comtesse de Noailles, dame d’honneur de la reine, était remplie de vertus ; la piété, la charité, des mœurs irréprochables faisaient d’elle une personne vénérable ; mais tout ce qu’un esprit exactement borné peut ajouter d’importun, même aux plus nobles qualités, la dame d’honneur en était abondamment pourvue. Il eût fallu à la reine une dame d’honneur qui lui fît bien connaître l’origine de ces étiquettes, à la vérité très-gênantes, mais érigées comme une barrière imposante contre la malveillance. L’usage d’avoir des dames et des chevaliers d’honneur, celui de porter des vertugadins de trois aunes de tour, a sans doute été inventé pour donner à nos jeunes princesses un entourage si respec-