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Page:Campan - Mémoires sur la vie privée de Marie-Antoinette, tome 1.djvu/275

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duchesses qui voulaient bien les placer sur leurs cartes[1].

On voit souvent des contrastes singuliers au milieu de la grandeur des cours : pour jouer un si gros jeu au pharaon de la reine, il fallait un banquier muni de fortes sommes d’argent, et cette nécessité faisait asseoir à la table de jeu, où l’étiquette n’admettait que les gens les plus titrés, non-seulement M. de Chalabre qui en était le banquier, mais un simple capitaine d’infanterie retiré, qui lui servait de second. On entendait aussi très-souvent prononcer un mot trivial, mais tout-à-fait consacré pour exprimer la manière dont on y faisait la cour au roi. Les hommes présentés, qui n’avaient point été invités à résider à Marly, y venaient cependant comme à Versailles, et retournaient ensuite à Paris ; alors il était convenu de dire qu’on n’était à Marly qu’en polisson ; et rien ne me paraissait plus singulier que d’entendre

  1. Bachaumont, dans ses Mémoires, souvent satiriques et toujours un peu suspects, parle de singulières précautions employées au jeu de la cour.

    « Les banquiers du jeu de la reine, dit-il, pour obvier aux erreurs (j’adoucis la rudesse de ses expressions) qui se commettent journellement, ont obtenu de S. M., qu’avant de commencer, la table serait bordée d’un ruban dans son pourtour, et que l’on ne regarderait comme engagé pour chaque coup que l’argent mis sur les cartes au-delà du ruban. » Il ajoute bien encore quelques détails qui annonceraient d’étranges distractions ; mais nous y croyons trop peu pour les rapporter. (Mémoires de Bachaumont, tome XII, page 189.)

    (Note de l’édit.)