Page:Campan - Mémoires sur la vie privée de Marie-Antoinette, tome 1.djvu/300

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la noirceur de ses ennemis avait été promptement reconnue et déjouée par le bon esprit et l’attachement du roi, et que le comte d’Artois s’était empressé de lui en apporter la nouvelle.

Ce fut, à ce que je crois, dans l’été de 1787, pendant un voyage de Trianon, que la reine de Naples envoya le chevalier de Bressac près de Sa Majesté, avec une mission secrète, relative à un projet de mariage entre son fils, le prince héréditaire, et Madame, fille du roi ; il s’adressa à moi en l’absence de la dame d’honneur : quoiqu’il me parlât beaucoup de la confiance intime dont l’honorait la reine de Naples, et de ses lettres de créance, je lui trouvai tout-à-fait l’air d’un aventurier[1] : il avait à la vérité des lettres particulières pour la reine, et sa mission était réelle ; il m’en entretint fort inconsidérément avant même d’avoir été admis, et me pria de faire tout ce qui dépendait de moi pour disposer l’esprit de la reine en faveur du vœu de sa souveraine : je m’en défendis en l’assurant qu’il ne m’appartenait pas de me mêler d’affaires d’État. Il voulut inutilement me prouver que l’union désirée par la reine de Naples ne devait pas être envisagée de cette manière.

J’obtins pour M. de Bressac l’audience qu’il désirait, mais sans me permettre de paraître instruite

  1. J’ai su qu’il avait ensuite passé plusieurs années enfermé au château de l’Œuf.
    (Note de madame Campan.)