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clergé, et devant le marquis de Dreux, grand-maître des cérémonies, qui précédait immédiatement les évêques duc de Laon et comte de Beauvais ; ils passèrent par une galerie couverte, et arrivèrent à la porte du roi, qu’ils trouvèrent fermée, suivant un usage qui remonte aux temps les plus anciens. Le chantre y frappe de son bâton ; aussitôt le grand-chambellan, sans ouvrir, lui dit : Que demandez-vous ? — Nous demandons le roi, répond le principal pair ecclésiastique. — Le roi dort, réplique le grand-chambellan. Alors le grand chantre recommence à frapper, et l’évêque continue à demander le roi, et la même réponse est donnée. Enfin à la troisième fois, le chantre ayant encore frappé, et le grand-chambellan répété que le roi dort, le pair ecclésiastique, qui a déjà porté la parole, dit ces mots qui lèvent tout obstacle : Nous demandons Louis XVI que Dieu nous a donné pour roi ; aussitôt les portes de la chambre s’ouvrent, et une autre scène commence. Le grand-maître des cérémonies conduit les évêques auprès de Sa Majesté couchée sur un lit-de-parade : ils la saluent très-profondément. Le monarque est vêtu d’une longue camisole cramoisie, garnie de galons d’or, et ouverte, ainsi que la chemise, aux endroits où Sa Majesté doit recevoir les onctions. — Par-dessus cette camisole, le roi a une longue robe d’étoffe d’argent, et sur sa tête une toque de velours noir garnie d’un cordon de diamans, d’une plume et d’une double aigrette blanche. Le pair ecclésiastique présente l’eau bénite au roi et dit l’oraison suivante : « Dieu tout-puissant et éternel, qui avez élevé à la royauté votre serviteur Louis, accordez-lui de procurer le bien de ses sujets dans le cours de son règne, et de ne jamais s’écarter des sentiers de la justice et de la vérité. » Cette oraison achevée, les deux évêques prirent Sa Majesté l’un par le bras droit, l’autre par le bras gauche, et l’ayant soulevée de dessus son lit, ils la conduisirent processionnellement à l’église, par la galerie couverte, et dans le plus pompeux cortége, en chantant de certaines prières.