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Page:Campan - Mémoires sur la vie privée de Marie-Antoinette, tome 1.djvu/68

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Le cardinal de Fleury, qui, à la vérité, eut le mérite de rétablir les finances, poussa ce système d’économie au point d’obtenir du roi de supprimer la maison et l’éducation des quatre dernières princesses. Elles avaient été élevées, comme simples pensionnaires, dans un couvent, à quatre-vingts lieues de la cour. La maison de Saint-Cyr eût été plus convenable pour recevoir les filles du roi ; le cardinal partageait probablement quelques-unes de ces préventions qui s’attachent toujours aux plus utiles institutions, et qui, depuis la mort de Louis XIV, s’étaient élevées contre le bel établissement de madame de Maintenon. Il aima mieux confier l’éducation de Mesdames à des religieuses de province. Madame Louise m’a souvent répété qu’à douze ans elle n’avait point encore parcouru la totalité de son alphabet, et n’avait appris à lire couramment que depuis son retour à Versailles.

Madame Victoire attribuait des crises de terreur panique qu’elle n’avait jamais pu vaincre, aux violentes frayeurs qu’elle éprouvait à l’abbaye de Fontevrault, toutes les fois qu’on l’envoyait par pénitence prier seule dans le caveau où l’on enterrait les religieuses. Aucune prévoyance salutaire n’avait préservé ces princesses des impressions funestes que la mère la moins instruite sait éloigner de ses enfans.

Un jardinier de l’abbaye mourut enragé ; sa demeure extérieure était voisine d’une chapelle de l’abbaye où l’on conduisit les princesses réciter les