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FRAGMENT

D’UNE LETTRE DE MADAME CAMPAN

À SON FILS.

20 novembre 1809.

Tu mérites d’être grondé, cher et bon enfant : l’argent est une chose si légère, quoique d’une nature pesante, que, si l’on ne fixe sur un registre le moment où on le reçoit, où on le possède, on s’expose à n’en conserver nulle trace, à ne jamais aligner sa dépense avec sa recette, vice si grave qu’il renverse les empires, comme il détruit les fortunes particulières.

Quelles leçons nous recevons du temps et de la différence des caractères qui passent sous nos yeux ! L’un a de l’esprit, mais il est emporté par ses passions et ses goûts ; l’autre a de la sagesse et n’a ni moyens ni talens.

L’un sait gagner des trésors, et ne peut conserver un sac d’écus.

Celui-ci a de l’ambition et ignore qu’elle a son temple, ses autels et ses ministres qu’il faut servir.

Celui-ci prend l’orgueil pour l’ambition, ou change son ambition en orgueil ; il brave tout ce