Page:Campan - Mémoires sur la vie privée de Marie-Antoinette, tome 3.djvu/214

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obligeantes sur son maintien. On est heureux d’être de cette classe blanche. Tu en serais en entrant ici, ma chère Élisa ; et moi je paie en ce moment mon étourderie, comme toi tu recevrais la récompense de ton application et de ton amour pour le travail. Je soupire en écrivant ceci ; mais je n’adresse mes reproches qu’à moi seule. Je n’aurais pas acquis de grands talens à Valence ; cependant le vieux secrétaire de mon père, le bon M. Dupuis enseignait bien, il me donnait assidument des leçons de grammaire, d’histoire et de géographie, mais je l’écoutais à peine, et je ne savais jamais mes leçons. Ma mère, qui ne songeait qu’à son ménage, et qui était souvent attristée par l’absence de mon père, me faisait de temps à autre des reproches : je savais qu’ils devaient durer à peu près dix minutes, je fixais pendant tout ce temps les yeux sur la pendule pour calculer le moment où je serais quitte de son sermon. Mon attention tout entière se portait sur le progrès de l’heure, et je n’écoutais rien de ce que disait ma mère. Je me le reproche bien sincèrement, je voudrais maintenant regagner le temps que j’ai perdu ; mais peut-être est-il trop tard : aide-moi de tes avis, encourage-moi par tes conseils, ma chère Élisa. Quelle précieuse chose qu’une bonne et sincère amie, et combien je suis heureuse d’en avoir rencontré une telle que toi !