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LETTRE XX.

Élisa à Zoé.

Chabeuil, ce 14 juin 1808.

Chère Zoé, je suis enchantée de ta dernière lettre ; elle est remplie de sentimens élevés. Mon amie, quel dommage si tu n’étais restée qu’une femme spirituelle et jolie ! Cet esprit de gentillesse, qui ne repose sur rien, passe avec l’éclat de la jeunesse et n’intéresse plus sans elle. On trouve, dit souvent mon oncle, de vieilles femmes minutieuses, fatigantes, qui ont joui, dans leur jeunesse, de la réputation de femmes aimables, sans avoir eu d’autres avantages que ceux d’une jolie figure et de quelque gentillesse dans les manières. La femme pourvue d’une solide instruction, ajoute-t-il, perd sa fraîcheur et le charme de ses traits, mais elle prend à chaque époque de sa vie le maintien qui lui convient ; une année de plus, une prétention de moins ; et elle conserve, jusqu’à la vieillesse, les grâces de son âge et l’estime de tous. Elle a été jusqu’à dix-huit ans jeune fille modeste ; tendre épouse et mère sensible, jusqu’à trente ; institutrice de ses filles, jusqu’à quarante ; conseil et amie de toute sa famille,