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Portraits de madame de Pompadour.

« Lorsque madame d’Étioles eut réussi à fixer l’attention du monarque sur elle, on pouvait la citer encore comme une des plus belles femmes de la capitale, et peut-être comme la plus belle. Il y avait dans l’ensemble de sa physionomie un tel mélange de vivacité et de tendresse ; elle était si bien tout à la fois ce qu’on appelle une jolie femme et une belle femme, que la réunion de ces qualités opposées dans le physique et dans le moral, en avait fait une sorte de phénomène.

» Ce n’est pas tant de la charpente de son visage que je veux parler, que de l’usage qu’elle savait en faire, et de la mobilité de ses traits et affections.

» Cette femme avait si bien étudié sa figure, qu’elle lui donnait les moralités et le physique que lui dictaient les circonstances. Elle se composait à volonté telle ou telle figure.

» Voulait-elle en imposer au roi ; elle se donnait les formes de la beauté, en observant uniquement le calme convenable et la représentation paisible et posée de son visage, et ce calme était nécessaire au développement des belles formes qu’elle réunissait, et qui étaient en très-grand nombre.

» Voulait-elle relever le ton imposant, calme et représentatif par quelque séduction ; elle avait recours à la mobilité étonnante de ses yeux et de sa physionomie, et à ces mouvemens naturels que les bons connaisseurs appellent de la vivacité ; et cette addition donnait un nouveau prix à la beauté de sa divine figure.

» Madame de Pompadour était ainsi une belle femme tout simplement et à volonté ; ou belle et vive tout ensemble ou alternativement, ce qui provenait des leçons que sa mère lui a fait donner par des comédiens, par des courtisanes célèbres, par des prédicateurs, par des avocats. Cette femme diabolique avait été chercher, dans tous les arts qui exigent une grande physionomie et une physionomie variée, des leçons particulières