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ment du théâtre qu’on parlait à la toilette de la reine. Elle voulait tout savoir sur une représentation à laquelle elle n’avait pas assisté. La question : Y avait-il beaucoup de monde ? ne manquait jamais. J’ai vu plus d’un gracieux duc lui répondre en s’inclinant : « Il n’y avait pas un chat. » Cela ne voulait pas dire, comme on pourrait le croire, que la salle eût été vide, il était même possible qu’elle eût été pleine ; mais, dans ce cas-là, on voulait dire que c’étaient des financiers, de bons bourgeois, des provinciaux qui la remplissaient. La noblesse, encore dois-je dire la haute-noblesse, ne connaissait que ses pareils. Pour en faire partie, il fallait avoir été présenté. Il y avait encore parmi les gens de cette classe une élite privilégiée : c’est ce qu’on appelait les gens titrés ; et les gens titrés qui habitaient Versailles, qui approchaient le roi et la reine, n’étaient pas sans quelque mépris pour ceux des leurs qui faisaient leur cour une seule fois par semaine. Dans ce cas-là, une femme présentée, titrée et portant le nom le plus illustre, pouvait être dédaigneusement rangée dans ce qu’on appelait les dames du dimanche.


La retraite de madame Louise, l’éloignement de la cour n’avaient fait que la livrer en entier aux intrigues du clergé. Elle recevait sans cesse les