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Page:Candeille - Catherine ou la belle fermiere - 1793 Maradan.djvu/62

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Lussan, se contraignant.

Elle l’est pour moi, du moins ; c’est ce qui m’a long-temps retenu. — Je n’ai presque rien à espérer, et j’ai craint que l’offre du peu que je vaux ne lui parût indigne d’elle.

Catherine, avec sentiment.

Détrompez-vous, Charles ; les femmes sont naturellement tendres et généreuses, et j’en connais pour qui l’amour d’un homme honnête et malheureux est cent fois plus à craindre que l’hommage fastueux de toutes les richesses de la terre. — Mais…

Lussan.

Continuez, je vous en prie.

Catherine, s’animant par degrés.

Où trouver un cœur vraiment sincère ? Quel est l’homme qui, dans sa vie, n’ait pas eu à se reprocher le malheur d’une femme ? Quelle est la femme qui n’ait pas, une fois, été victime de sa sensibilité ? Et l’on s’étonne qu’elles deviennent fausses, méchantes, coquettes…… quelquefois pis encore ! … tout dépend du premier pas qu’elles font dans le monde. Uniquement livrées à l’attrait enchanteur d’un sentiment dont leur cœur est avide, à cet âge sur-tout où elles n’attendent que le plaisir et ne conçoivent que le bonheur, leur destinée entière est attachée aux suites de cette fatale impression ; et telle, qui heureuse et récompensée dans son choix, eût passé doucement la vie entre les devoirs charmans d’un véritable amour et les jouissances inappréciables de la vertu, irritée et avilie par la con-