Page:Capus – Qui perd gagne.djvu/23

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de regret ni d’amertume : lui, délivré enfin de l’écœurement de ses amours ordinaires ; elle, désennuyée par la bonne humeur de Farjolle et le sans-gêne de ses façons.

Il lui raconta sa misère, sa décave, comme il disait d’un mot plus élégant, qu’il s’était souvent passé de dîner et qu’il avait couché sur les canapés des tripots. Ces histoires l’amusaient.

— Oh ! moi, s’il me fallait être inquiète du lendemain, je crois que j’en finirais avec l’existence… Je n’ai jamais souhaité de faire la fête et j’aurais pu, cependant… Être tranquille et m’amuser gentiment quand l’envie m’en prendra, je ne désire rien de plus.

Leur liaison durait depuis trois mois. Ils dînaient maintenant tous les soirs ensemble, tantôt au restaurant, tantôt chez Emma par économie. Car la patronne connaissait la cuisine, le ménage et tout ce que comporte l’éducation des femmes à Montmartre.

Un matin, de bonne heure, ils furent réveillés par des coups très violents frappés contre la porte de la chambre. Farjolle sauta à bas du lit, pris de la vague inquiétude de quelque chose de désagréable.

— Qui est là ?

— Ah ! c’est vous, monsieur Farjolle ! cria une voix bourrue. Je vous trouve enfin, ouvrez donc.

— Je ne peux pas, je ne suis pas seul ; mais je passerai chez vous cette après-midi… à trois heures juste, répondit Farjolle, croyant se débarrasser de son créancier par la précision de sa promesse.

Le visiteur tourna le bouton de la porte et appuya. En même temps, il chassait du pied les deux bottines disposées le long du mur, et ce geste brutal signifiait