Page:Capus – Qui perd gagne.djvu/44

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gagner de l’argent et de vivre à notre aise… après, nous verrons.

— Oh ! je ne fais pas le difficile et je m’en moque autant que toi. Tu l’as dit : ça n’a pas d’importance.

Il employait souvent cette expression qui lui rendait de grands services dans ses raisonnements. Grâce à elle, il tranchait bien des petites difficultés intimes, par exemple la question des premiers amants d’Emma, du chef de bureau… Pas d’importance le chef de bureau : elle le lui montrerait dans la rue, il ne se détournerait même pas. Velard venait d’être traité de « fripouille », il n’y songeait déjà plus, sûrement. Demain, lui et Brasier se serreraient la main… Pas d’importance.

— Au fait, dit il, en arrivant devant la porte du restaurant, achetons le journal de Dartot. Il vient de paraître, il contient sans doute le procès-verbal.

Au même instant, un coupé s’arrêta. Paul Velard et une dame en descendirent.

Paul tenait le journal à la main et sa figure marquait une grande satisfaction.

— Nous présenterons ces dames là-haut. Le commandant doit y être déjà, il est très exact.

Le commandant, en effet, fumait depuis un quart d’heure des cigarettes sur le sofa de velours rouge du cabinet. Il s’était mis en habit noir. « Toujours en frac, dans les dîners de duel, même s’il n’y avait pas eu rencontre effective. » C’était son principe.

Il fit des compliments aux femmes, avec sa galanterie raffinée de témoin. Paul les présenta.

— Madame Jeanne d’Estrelle… Madame Farjolle… Emma pensa : « Elle a bien l’air d’une cocotte, mais bonne fille. » L’autre ne pensa rien et se mit à bavar-