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Page:Carco - L'Homme traqué, 1922.djvu/209

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Il appela Léontine… Sans elle, qu’allait-il devenir ? Déjà, le simple fait d’apprécier à leur valeur les secours qu’il en avait eus faisait entendre à Lampieur qu’il se préparât à souffrir. Mais quoi ?… dans quelle mesure ? Il avait beau se dire que l’instant approchait, le souvenir de Léontine l’en défendait encore et il s’y retenait avec l’effroi d’un homme qui voit s’ouvrir, sous lui, le vide et s’y sent attiré…

Alors ses dernières forces l’abandonnèrent et Lampieur se trouva seul au monde, et il commença d’éprouver une douleur qu’il ne soupçonnait pas. Il lui sembla que quelque chose en lui avait besoin de cette douleur pour renaître à la vie. Au début, il en fut étonné. Il assistait à une transformation de toutes ses habitudes qui l’éveillait au sentiment d’une existence dont il avait, depuis son crime, perdu jusqu’à la plus humble notion. Qu’est-ce qu’une pareille transformation signifiait ? Vers quel but tendait-elle ? Lampieur ne le discernait point. Il était comme un homme qui, dans un accident, revoit tout son passé et en éprouve, à la seconde, une impression