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Page:Carco - L'Homme traqué, 1922.djvu/211

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mené des jours d’une obsédante monotonie et des nuits aussi longues l’une que l’autre et aussi inutiles. À quoi servait d’en augmenter le nombre ? Lampieur se l’était demandé bien souvent. Il n’avait pas de vices… il s’ennuyait… Le soir, quand il descendait de sa chambre, il se disait qu’à la même heure le lendemain il accomplirait les mêmes gestes et irait boire encore un verre chez Fouasse. Cela l’humiliait, le blessait. Autour de lui, les gens qu’il écoutait parler lui semblaient dénués d’intérêt. Il les regardait cependant, les observait comme des jouets grotesques qui avaient l’apparence de vivre et ne vivaient pas véritablement. Lui-même leur ressemblait. Il s’appuyait comme eux, au rebord du comptoir, fumait, allait, venait… Était-ce une existence ? Lampieur en était excédé.

Sous ses dehors bourrus, une perpétuelle inquiétude se cachait. Elle s’en prenait à tout. Elle devenait comme une manie insupportable et Lampieur ne savait pas quelles limites lui fixer.

Il en résulta que Lampieur prit de lui-même