Page:Carco - L'Homme traqué, 1922.djvu/41

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brutal… on lui « mettrait la patte dessus », à lui, Lampieur… parfaitement… Pourquoi pas ?… Oubliait-il son crime ? C’est vrai… Il ne l’avait pas oublié, mais il n’y pensait pas… Il n’y pensait presque jamais… Dans sa tête, c’était moins le crime qui amalgamait des souvenirs et des idées pénibles que cette déconcertante histoire de ficelle et de complicité à laquelle Léontine se trouvait mêlée. Comment cela s’était-il donc produit ? Pourquoi ? C’était invraisemblable. Un assassin n’aurait pas de remords ? Lui, qui était un assassin, n’en avait pas. Il ne savait même pas encore ce que c’était. Au début, les deux ou trois premiers jours, une sorte d’étonnement était lié à sa frayeur. Puis la frayeur avait tout envahi chez lui, en même temps qu’un sentiment obscur le portait à croire qu’on ne l’inquiéterait pas pour son crime, à condition qu’il continuât de vivre comme avant. Il lui semblait que quelque chose de pareil à un accord tacite avait été conclu entre sa conscience et la force machinale de ses plus quotidiennes habitudes. Et alors, parce qu’il n’avait plus rien à redouter de ce côté, Lampieur s’était