Aller au contenu

Page:Carco - L'Homme traqué, 1922.djvu/51

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

un comptoir, des rayons, deux chariots, dans lesquels Lampieur avait monté le pain de ses premières fournées, une balance…

— Monsieur ! appela Léontine.

— Je suis là, dit Lampieur. Il haussa les épaules.

— Oh ! non ! Je ne veux pas, murmura lentement Léontine.

Elle écarta, d’un geste exténué, les souvenirs, les pensées, les images qui dansaient devant elle et qui, tout en n’ayant encore aucun sens, menaçaient d’en avoir un bientôt qui la rendrait à son tourment. En effet, dans ce tourbillon incessant qui s’agitait devant ses yeux, Léontine découvrait peu à peu le but vers lequel elle tendait. C’était le but de toutes ses nuits. Elle n’en pouvait douter et la chose qui était en elle, et qui continuait de naître au sentiment trouble et profond de sa conscience, elle la reconnaissait pour être impitoyablement la même chose qui la poussait, depuis la nuit du crime, vers le soupirail où Lampieur l’avait tout à l’heure rencontrée. Maintenant, elle approchait, à le toucher, l’objet même de sa souffrance.