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L’HOMME TRAQUÉ

Au petit jour, après qu’il avait rangé sur les rayons de la boutique ses quatre fournées de pain et les croissants encore tout chauds, Lampieur montait dans sa chambre et, la fatigue de la nuit pesant sur lui de toute sa masse, il finissait parfois par s’endormir. Mais, quand Lampieur se réveillait, aussitôt, son angoisse s’éveillait avec lui et il avait beau s’employer à la chasser, il n’y parvenait point.

L’homme, alors, rejetait les draps et les couvertures, de son lit, se levait, chaussait de vieilles savates et poussait, dans le toit, une fenêtre à tabatière pour aspirer l’air du dehors. Mille bruits lui arrivaient. Il les reconnaissait, un à un, depuis celui des autobus qui ébranlaient, contre la sienne, les maisons de la rue Rambuteau, jusqu’à celui — si faible et cependant distinct — du grelot attaché sous la selle d’un lointain triporteur.