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— A chaque nouvel accroissement dans la proportion suivant laquelle la matière a revêtu la forme d’homme, nous trouverons, par suite, un accroissement dans le pouvoir de celui-ci, de guider et diriger les forces destinées à son usage avec un mouvement qui s’accélère constamment, et des changements de forme constamment plus rapides, et un accroissement constant dans son pouvoir d’avoir à sa disposition les substances alimentaires et les vêtements nécessaires à son entretien.

Que dans le monde matériel la résistance à la gravitation soit en raison directe de l’organisme, c’est ce qui sera évident pour le lecteur, après un moment de réflexion. La matière inorganique se développant sous l’influence de la chaleur, le plus léger abaissement de température suffit pour la condenser de nouveau et la faire retomber en pluie. Dans le monde organique, on trouve les formes les plus humbles de la vie végétale dans les petites plantes qui chaque année retournent à la poussière d’où elles sont venues ; tandis qu’on trouve les formes les plus élevées dans le chêne, qui pendant plusieurs siècles étend ses rameaux en défiant l’effort des vents, donne, chaque année, des feuilles, des fleurs et des fruits, malgré la force de gravitation. Dans le monde animal, ce sont les mollusques, les insectes corallifères et les polypes, placés au dernier échelon des êtres organisés, qui sont le plus subordonnés à l’empire des forces qui les enchaînent à la terre. Mais cette subordination diminue à mesure que nous nous élevons jusqu’au cheval, jusqu’à l’abeille et à l’oiseau. Arrivés à l’homme, nous le trouvons se créant une demeure sur les eaux vives, ou à son gré pénétrant dans les profondeurs de l’Océan ; tantôt faisant sur un navire le tour du globe, et tantôt se préparant des machines à l’aide desquelles il peut descendre au sein de l’immense abîme ; et non-seulement en remonter, mais en rapporter, contrairement aux lois de la gravitation, les matières inorganiques qui conviennent à ses besoins.

Il en est de même à l’égard des races humaines. Plus elles sont abaissées par rapport à leur condition morale et physique, plus elles sont soumises aux forces centralisatrices, et c’est pourquoi, dans les premiers âges de la société, lorsque ces races n’exercent qu’un faible pouvoir sur la nature, nous voyons qu’il a été si facile aux Attila et aux Alaric de réunir des millions d’individus, pour piller et massacrer ceux qui avaient le bonheur d’être mieux pourvus