Page:Carey - Principes de la science sociale, Tome 1.djvu/31

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il peut inférer qu’il en sera toujours ainsi, mais dont il ne peut acquérir la certitude que lorsqu’il se sera rendu compte des causes qui l’ont produit. Un certain jour il voit le soleil s’éclipser, un autre jour la lune cesse de donner sa lumière, et il veut savoir pourquoi ces phénomènes ont lieu, quelle loi régit les mouvements de ces corps. Une fois en possession de cette connaissance ; il peut prédire à quel moment ils cesseront de nouveau d’éclairer le monde, et déterminer à quelle époque le même fait a dû se passer dans les temps anciens. Tantôt la glace ou le sel se fond, tantôt le gaz fait explosion ; un autre jour les murailles des cités sont ébranlées dans leurs fondements et leurs débris jonchent le sol ; il cherche à savoir ce qui a produit ces catastrophes, à connaître les rapports des causes et des effets. Dans ces efforts pour obtenir la réponse à toutes ces questions, il observe et enregistre des faits, et il les systématise dans le but d’en déduire les lois en vertu desquelles ces faits se produisent ; c’est alors qu’il invente les baromètres, les thermomètres et d’autres instruments pour l’aider dans ses observations ; mais le but final de tous ses efforts consiste toujours à obtenir une réponse aux questions suivantes : Quelle est la cause de tous ces faits ? Pourquoi la rosée tombe-t-elle sur la terre tel jour et non pas tel autre ? Pourquoi le blé pousse-t-il abondamment dans tel champ et manque-t-il tout à fait dans tel autre ? Pourquoi la houille brûle-t-elle et pourquoi le granit est-il incombustible ? Quelles sont en un mot les lois établies par le Créateur pour le gouvernement de la matière ? Les réponses à ces questions constituent la science, et les mathématiques, la logique et tous les autres mécanismes en usage ne sont que des instruments employés par l’homme pour résoudre ces mêmes questions.

En discutant le sujet de la mécanique rationnelle sous le titre de Mathématiques, M. Comte avertit ses lecteurs « qu’ici nous rencontrons une confusion perpétuelle entre les points de vue abstraits et concrets ; logiques et physiques, entre les conceptions artificielles nécessaires pour fonder les lois générales d’équilibre de mouvement, et les faits naturels fournis par l’observation qui doivent former la base même de la science[1]. » Ceci revient à dire que les faits naturels fournis par l’observation, devenant plus

  1. V. Aug. Comte, Philosophie positive, traduction de Miss Martineau, t. I, p. 107.