Page:Carey - Principes de la science sociale, Tome 1.djvu/407

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

les céréales furent rapportées, dans le but de permettre à ces pays d’entrer en concurrence avec l’Irlandais affamé, qui fut ainsi privé immédiatement du marché de l’Angleterre, ainsi qu’il avait été privé du sien propre par l’Acte d’Union. La coupe de la misère, déjà bien près d’être pleine fut alors comblée. Le prix des subsistances baissa et le travailleur fut ruiné ; car tout le produit de sa terre pouvait à peine payer son fermage. Le landlord fut ruiné ; car en même temps qu’il ne pouvait percevoir de revenu, il se trouvait taxé d’une façon onéreuse pour entretenir ses tenanciers appauvris. La terre était grevée d’hypothèques et de constitutions de rentes créées, à l’époque où les subsistances étaient à un prix élevé ; mais maintenant il ne pouvait continuer à payer l’intérêt. Ce fut dans cette intention que le peuple anglais eut recours à la mesure révolutionnaire de la création d’un tribunal spécial, pour la vente de toutes les propriétés hypothéquées et la distribution des produits de cette vente ; donnant ainsi la preuve la plus claire des mauvais errements du système qui avait régi l’Irlande.

Le propriétaire terrien appauvri, éprouvait maintenant le même sort auquel avait succombé son malheureux tenancier ; et à partir de cette époque, la famine et la peste, les arasements de maisons et les évictions ont été à l’ordre du jour. Leur effet ayant été partout de faire expulser les pauvres gens de la terre, les conséquences se révèlent dans ce fait, que la population comptait en 1850, un million six cent cinquante-cinq mille de moins qu’en 1840, tandis que la population famélique des villes avait augmenté considérablement. La population du comté de Cork avait diminué de 222.000 individus, tandis que celle de Dublin avait augmenté de 22.000. Le comté de Galway en avait perdu 125.000, tandis que la ville en avait gagné 7.422 ; Connaught avait perdu 414.000, tandis que Limerick et Belfort en avaient gagné 30.000. Le nombre des maisons habitées était tombé de 1.328.000 à 1.047.000, soit une diminution de plus de 20 %. En annonçant ces faits saisissants, le Times de Londres établissait que, pendant toute une génération, l’homme n’avait été qu’un poison en Irlande, et la population une plaie. « L’inépuisable approvisionnement d’Irlandais, avait, continuait-il, maintenu à un taux bas le prix du travail anglais ; » mais ce bon marché du travail « avait contribué immensément aux progrès et à la puissance de l’Angleterre, et considérablement aux