Page:Carey - Principes de la science sociale, Tome 2.djvu/243

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

lement que parfois il a été hors de toute portée, comme en 1821 et 1842. Pour les quelques dernières années, le taux d’intérêt dans les grandes villes a monté de 8 à 30 % : tandis que le pauvre émigrant a payé tristement 50 et 60 %, pour l’usage d’un argent que, sous d’autres circonstances, il eût obtenu facilement à 6. L’argent est à un prix modéré et s’obtient facilement quand il y a circulation rapide du travail et de ses produits, comme ce fut le cas en 1832 et 1846. Il est toujours cher quand la circulation est paresseuse, comme il arrive dans chaque période où le commerce va périssant sous les atteintes du trafic.

Le commerce, en créant des centres locaux, permet au fermier de varier ses produits, et ainsi par degrés, le délivre de la nécessité d’aller à distance, en même temps qu’il l’affranchit de la taxe de transport et de la domination du trafiquant lointain. Devenant riche, il améliore son outillage de culture et combine avec ses voisins pour le projet d’ouvrir des routes vers les différents marchés, proches ou distants qui offrent débouché aux utilités fournies par sa terre. Le trafic au contraire — brisant les centres locaux — force le fermier à se borner à ces denrées qui se prêtent au transport à la cité éloignée — maintenant ainsi la taxe de transport et le tenant sous la domination des gens qui commandent le mouvement du marché central. Restant pauvre, il se trouve dans l’impuissance de défricher ou de cultiver les riches sols, et il est forcé de solliciter l’aide du trafiquant lointain lorsqu’il désire une route pour porter, même à soi, les produits de sa ferme.

La population d’Allemagne et de France, de Belgique et de Russie fait ses routes. Celles d’Irlande et celles de l’Inde sont forcées de chercher au dehors les moyens de faire leurs routes intérieures ; et plus on fait de routes de cette manière, plus on s’appauvrit. Il en a été et il en est ainsi pour la population de nos États-Unis. En 1836, on a acheté à crédit pour des centaines de millions de dollars de drap et de fer étranger pour s’aider à faire des canaux et des routes, on en a vu le résultat dans une énorme dispersion de population, suivie d’un degré de détresse agricole qui n’a jamais eu son pareil. Lorsque fut passé l’acte de 1842, tout cela cessa — car l’on n’eût plus besoin de prêts étrangers.

Avec le renouvellement du système de trafic sous le tarif de 1846, l’état de choses qui existait en 1836 est de nouveau revenu.