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main et dans un mois, il faudra deux de ces pièces ; et puis, à la fin d’un autre mois, un baril de la même dimension n’obtiendra qu’un peu plus que le coût de transport[1]. Aujourd’hui la monnaie se loue à 8 ou 10 % ; demain elle commandera 40, 50 ou 60 %.

La tendance de l’or et de l’argent, à la fermeté de valeur, est leur grand titre à servir d’étalons auxquels rapporter la valeur des autres utilités ; et là où le négoce de monnaie est libre d’intervention, ils sont presque aussi parfaits pour ce service, qu’un bâton d’une aune comme mesure de longueur, ou qu’un boisseau comme mesure de capacité. La masse totale de blé, de coton et de sucre, sur le marché, chaque année, étant consommée dans l’année, un manque de récolte peut causer un changement de cinquante, ou même de cent pour cent dans le prix ; tandis que la quantité d’or et d’argent en permanence sur le marché étant des centaines de fois plus forte que ce qui s’en consomme en une année, un déficit complet de la récolte d’un an n’affecterait pas d’1 % le prix.

Néanmoins, les interventions, dans le commerce de monnaie, ont toujours été tellement nombreuses, que, de toutes les choses, c’est la plus sujette à une altération soudaine dans l’offre et la valeur. C’est une aune dont la longueur change perpétuellement, — un litre qui contient parfois trois quarts de litre, d’autres fois six, ou même douze. Pourquoi ? Nous allons le chercher.

§ 5. — La monnaie étant l’instrument indispensable de société, les gouvernements ont toujours gardé la haute main sur son service, comme fournissant la plus productive de toutes les machines de taxation. Phénomènes que présente l’histoire de la Grèce et de Rome.

La centralisation donnant puissance à la classe qui vit en vertu du pouvoir d’appropriation, — le soldat et le négociant, — chaque accroissement de cette classe est suivie d’un surcroît de taxes à lever. Les articles choisis comme sujets de taxation sont toujours ceux de nécessité absolue, — sel, sucre, tabac, et autres choses d’un usage universel. De toutes, cependant, il n’en est pas une aussi indispensable au mouvement sociétaire que la monnaie. Aussi voyons-nous si généralement que les gouvernements en ont pris le maniement pour l’exercer au profit public, ou à quelque profit particulier.

Avec l’accroissement du pouvoir de centralisation dans l’État d’Athènes, nous remarquons accroissement constant de la valeur de la monnaie comparée à celle de l’homme, et accroissement du

  1. Voir précéd., p. 140.