Page:Carey - Principes de la science sociale, Tome 3.djvu/14

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fournir leur aide ; il ne lui faut qu’être induit à se rendre capable de les soumettre à sa domination et d’ajouter ainsi à sa richesse.

§ 2. — Produire c’est approprier les forces de la nature au service de l’homme. Pour arriver à commander à la nature, l’homme doit se mettre d’abord en état de commander aux pouvoirs latents que lui-même possède. Identité des lois physiques et sociales.

Pour qu’il se rende capable de commander aux forces de la nature, il faut que ses propres facultés latentes soient stimulées vers l’action, résultat qui ne s’obtient que par l’association et la combinaison avec ses semblables. Le solitaire Crusoé fera un arc ; mais lorsqu’il tente d’abattre un arbre et de construire un canot, il ne réussit pas. Sa force est impuissante à construire un batardeau, faute duquel l’eau qui descend de la colline reste aussi peu utilisée qu’avant son arrivée dans l’île. Faute de pouvoir convertir le minerai en fer et le fer en instruments, il aurait pu être entouré de houille et de fer et néanmoins périr par le manque d’une hache ou d’une bêche. Forcé d’appliquer son travail à toutes sortes d’objets, il est incapable d’acquérir le contrôle parfait des facultés qu’il possède le mieux. À l’arrivée de Vendredi commence la division du travail ; chacun prend la partie pour laquelle il a le plus d’aptitude. Plusieurs voisins surviennent, on fait de nouvelles divisions dû travail, et, d’année en année, il devient de plus en plus évident que chacun, sans exception, a son individualité distincte, qui le rend propre à faire telle ou telle chose mieux que les autres membres de la petite communauté.

L’individualité ainsi développée, le commerce éclot et la société est formée, chaque acte de commerce consistant dans la consommation de deux efforts de pouvoir physique ou intellectuel, et la production de deux résultats qui, à leur tour, sont consommés. Plus la consommation est instantanée, plus l’activité redoublera, plus il y aura tendance à l’accroissement de force et à la continuité de mouvement.

Dans le monde matériel, production et consommation ne font que deux parties d’une même opération. Oxygène et hydrogène sont consommés à produire l’eau, et l’eau est consommée à reproduire ses éléments. Dans les deux cas, il y a mouvement produit, fournissant une force qui se mesurera par la vitesse du mouvement. Il en est ainsi dans le monde physiologique. La vie est un cercle constant de production et de consommation, la santé et la vigueur sont en rapport avec la rapidité de la digestion. — Il en est ainsi dans le monde social, la force y est en rapport avec la circulation des efforts physiques et intellectuels des individualités dont il