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Page:Carmontelle - Proverbes dramatiques, Tome 7.djvu/216

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M. COLLIGER.

Supposons le dîner fini.

L’ABBÉ.

Un moment. Tenez, il me semble que je vois le dîner. Nous avions deux potages succulents : le Doyen aimoit le potage, il me semble que je le vois là à le manger ; car c’étoit ici, cette maison lui appartenoit. Il avoit à côté de lui le Chanoine Long-Brun, qui étoit maigre & sec ; mais qui buvoit bien du vin.

M. COLLIGER.

Cela n’est pas nécessaire à savoir pour…

L’ABBÉ.

Pardonnez-moi, c’est pour vous prouver que ma mémoire est fidelle. A chaque bout de la table il y avoit des côtelettes de veau. Le Chanoine Gobart en mangea sept à lui seul, & Raclart onze ; il me semble que je les vois tous deux boire & manger. Gobart avoit une bonne trogne ; & comme il rioit toujours quand il avoit la bouche pleine, & qu’il parloit, il ne faisoit pas bon être de ses voisins. Ce même jour, le Chanoine Blondinau s’en plaignit beaucoup, il étoit dans une colere qui nous fit bien rire ; il me semble que je le vois. (Il rit long-temps.)

M. COLLIGER, à part.

Quel homme ! quel homme ! Il ne finira jamais !