Page:Carné - Souvenirs de ma jeunesse au temps de la Restauration.djvu/101

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ments et ses colères contre l’instrument, peut-être aveugle, d’une dangereuse intrigue déjouée par la fermeté de son attitude.

À la question de dynastie la force des choses avait joint une question constitutionnelle qui, tout en rencontrant bien moins de faveur dans la plupart des cabinets, dut être résolue dans le même sens par une conséquence à bien dire inévitable. D. Pedro ayant assis le trône de sa fille sur l’établissement d’une Charte, et se refusant absolument à séparer ces deux intérêts, le tout était à prendre ou à laisser. Les ministres de la sainte alliance se trouvèrent donc dans la stricte obligation de subir la constitution de D. Pedro IV, afin de ne pas ébranler la royauté contestée qui s’élevait à son ombre. Cette situation anormale avait amené dans le corps diplomatique à Lisbonne une sorte de désarroi des plus curieux à observer.

Rien n’était plus faible et plus débile que le germe politique implanté du dehors dans ce sol si peu préparé pour le recevoir. À cette époque-là, les idées modernes avaient encore moins de racines en Portugal qu’en Espagne, et n’y correspondaient pas plus aux intérêts qu’aux habitudes. Accueillies avec quelque satisfaction par l’épiscopat et par la haute noblesse, auxquels l’établissement d’une Chambre des pairs ouvrait la carrière politique, les institutions constitutionnelles avaient rencontré une grande faveur dans la bourgeoisie, particulièrement à Porto, centre commercial important très-accessible aux influences étrangères. Mais le bas peuple des villes et surtout les populations ru-