Page:Carné - Souvenirs de ma jeunesse au temps de la Restauration.djvu/105

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ne pouvait le toucher du plat de la main, conformément à l’usage.

Sans pouvoir rien affirmer personnellement touchant l’exactitude de ce triste détail, dont le bruit fut universellement répandu, il est certain, du moins, qu’aucun procès-verbal de la prestation du serment ne fut dressé, et qu’on fit les plus grands efforts pour effacer les traces d’une cérémonie à laquelle avaient assisté tous les corps de l’État et l’Europe représentée par ses agents diplomatiques.

Toutefois, l’accomplissement, au moins matériel, de cette solennité rendit un moment d’espoir au parti libéral ; mais peu de jours après cette séance, le nouveau régent, congédiant brusquement le cabinet qui gérait les affaires avec le concours de la majorité parlementaire, constitua un autre ministère formé par la reine douairière et composé d’adversaires très-connus du régime nouveau. Ni la capitale ni la province ne se trompèrent sur la portée de cet acte décisif. Tous les hommes dévoués au gouvernement constitutionnel quittèrent les fonctions publiques ; mais les fonctionnaires compromis n’en firent que plus de zèle afin de se mettre en règle avec un très-prochain avenir ; et les constitutionnels, isolés dans la nation et repoussés du gouvernement, se virent partout à la merci de leurs ennemis. Aux abords du palais où le régent exerçait encore tous ses pouvoirs au nom de la reine dona Maria II, dont il faisait figurer le nom en tête de tous les actes publics, les acclamations populaires à D. Miguel, roi absolu, se firent chaque jour entendre