Page:Carné - Souvenirs de ma jeunesse au temps de la Restauration.djvu/106

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sans nulle répression. Le ministre d’Autriche fut gravement molesté par la populace pour avoir refusé de répéter ce cri, et le cardinal patriarche subissant la même violence, ne parvint à échapper aux émeutiers qu’en s’esquivant au plus vite, tandis qu’ils se mettaient à genoux pour recevoir sa bénédiction.

Deux motifs retardaient seuls le dénoûment de cette comédie. Embarrassé par ses déclarations réitérées, l’infant voulait persuader à l’Europe qu’il avait dû céder à une pression irrésistible. Il attachait un prix au moins égal à recevoir, avant d’imprimer aux événements une impulsion décisive, le versement d’un emprunt négocié durant son séjour à Londres, versement à la veille de s’opérer et qu’une révolution trop hâtive aurait pu compromettre. Mais les meneurs avaient imprimé au mouvement miguéliste une telle violence, qu’ils n’étaient pas en mesure de le retarder au gré de leurs calculs. Le sang coulait dans plusieurs provinces, et la ville de Porto, centre de l’opinion constitutionnelle, était devenue le théâtre d’une formidable insurrection contre le gouvernement de l’infant régent. On fut ainsi conduit à précipiter l’issue de la crise, et D. Miguel prononça la dissolution de la Chambre, en provoquant un appel au peuple sur la question dynastique par la convocation des anciens états du royaume.

Aucun partisan de la jeune reine ne comparut à des élections dont le résultat était connu d’avance, et dans lesquelles les populations rurales trouvaient à satisfaire toutes leurs antipathies contre des importa-