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Page:Carné - Souvenirs de ma jeunesse au temps de la Restauration.djvu/17

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CHAPITRE I

UN DÉBUT À PARIS EN 1820


Notre génération a connu toutes les extrémités des choses humaines, et ses cris de douleur retentissent aujourd’hui moins haut en Europe que ne le faisaient, il y a soixante ans, les chants de triomphe au bruit desquels elle entra dans la vie. En elle s’accomplit l’unité du drame qui rattache au souvenir de nos fautes leur terrible expiation. Mais entre les gloires et les hontes également sanglantes des deux empires, s’étend une ère pacifique, sorte de trêve de Dieu, durant laquelle le pays tenta la solution des plus ardus problèmes de l’ordre politique, tandis que l’humanité semblait prendre, en triomphant de l’espace et du temps, une possession plus complète du domaine de la création.

C’est dans le cours de ces fécondes années que se concentreront ces souvenirs. Ils correspondent à la première période d’une existence qui s’ouvrit à l’heure même où la couronne de France fut ramassée par un soldat. Ma vie commença au sortir de la crise