Page:Carné - Souvenirs de ma jeunesse au temps de la Restauration.djvu/99

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de Rauzan ayant été retenue en France afin de donner des soins à madame la duchesse de Duras, sa mère, atteinte déjà de la maladie à laquelle elle succomba dans le cours de l’année suivante. En compensation de l’agrément qu’aurait apporté dans nos relations du monde la présence d’une belle ambassadrice, nous trouvâmes une entière liberté tempérée par le plus affectueux respect pour notre chef. Austère dans ses mœurs comme dans ses croyances, fort arrêté dans ses idées sous l’apparence d’une bonhomie souriante, M. le duc de Rauzan possédait le trésor caché d’un esprit fin et caustique qui aurait été plus généralement reconnu s’il s’en était servi plus souvent pour se faire craindre. Soit modestie, soit indifférence, il n’éprouvait aucun désir de donner aux autres la juste mesure de lui-même. Habituellement silencieux dans l’élégant salon de madame la duchesse de Rauzan, il en était presque toujours l’homme le plus remarquable et le moins remarqué ; et comment ne l’y point admirer, conservant, au milieu des douleurs les plus aiguës, l’inaltérable sérénité d’un chrétien semblable à lui-même dans toutes les fortunes, et dont l’esprit n’avait pas plus vieilli que le cœur ?

Durant la crise dans laquelle se trouvait alors engagé le Portugal, M. le duc de Rauzan eut l’avantage d’appliquer des instructions pleinement conformes à sa propre pensée. Des événements survenus en 1826 avaient surgi deux questions distinctes, mais étroitement associées : la première se rapportant au droit de sucessibilité au trône ; la seconde à l’établissement du