Page:Carnot - Réflexions sur la métaphysique du calcul infinitésimal, 1860.djvu/136

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163. La règle doit être, ce me semble, de prendre toujours la voie la plus simple, et à difficultés égales, de prendre la plus lumineuse : aucun moyen ne doit être exclusif. Ainsi, pour en revenir à notre objet, parmi les méthodes dont nous avons parlé, il faut, pour l’usage habituel, choisir celle qui mène en général au but, par la route la plus courte et la plus facile, mais sans rejeter aucune des autres, parce que ce sont d’abord en elles-mêmes de belles spéculations pour l’esprit, et ensuite parce qu’il n’y en a pas une peut-être qui ne puisse conduire à quelque vérité jusqu’alors inconnue, ou procurer dans certains cas un résultat inattendu, ou une solution plus élégante que toutes les autres.


164. Mais parmi toutes ces méthodes, qui ont leur origine commune dans la méthode d’exhaustion des anciens, quelle est celle qui offre le plus d’avantage pour l’usage habituel ? Il me semble qu’il est généralement convenu que c’est l’analyse leibnitzienne.

Les travaux de Descartes, de Pascal, de Fermat, de Huyghens, de Barrow, de Roberval, de Wallis, de Newton surtout, prouvent que l’on touchait depuis longtemps à cette grande découverte, lorsqu’elle fut proclamée par Leibnitz ; et je pense qu’il n’est aucun de ces illustres géomètres qui ne l’eût faite, s’il eût soupçonné qu’il y avait à cet égard une grande découverte à faire ; c’est-à-dire qu’il n’y en a pas un d’entre eux qui n’eût trouvé un moyen pour réduire en algorithme la méthode d’exhaustion, si l’idée lui fût venue de la chercher, et qu’il eût prévu toute la fécondité dont pourrait être quelque jour un pareil moyen. Peut-être même que parmi les divers algorithmes créés par tant de génies originaux, il s’en serait trouvé quelques-uns qui eussent obtenu la préférence sur celui de Leibnitz, que l’habitude a consacré parmi nous, non moins que les précieux et immenses travaux qui sont aujourd’hui revêtus des formes de cet algorithme.


165. « On peut, dit Lagrange, regarder Fermat comme le premier inventeur des nouveaux calculs.

» Barrow imagina de substituer aux quantités qui doivent être supposées nulles suivant Fermât, des quantités réelles,