Page:Carnot - Réflexions sur la métaphysique du calcul infinitésimal, 1860.djvu/137

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mais infiniment petites, et il donna, en 1674, sa méthode des tangentes, où il considère la courbe comme un polygone d’une infinité de côtés ; mais ce calcul n’était encore qu’ébauché, car il ne s’appliquait qu’aux expressions rationnelles.

» Il restait donc à trouver un algorithme simple et général, applicable à toutes sortes d’expressions, par lequel on pût passer directement et sans aucune réduction, des formules algébriques à leurs différentielles. C’est ce que Leibnitz a donné dix ans après. Il paraît que Newton était parvenu, dans le même temps ou un peu auparavant, aux mêmes abrégés de calcul pour les différentiations. Mais c’est dans la formation des équations différentielles et dans leur intégration que consiste le grand mérite et la force principale des nouveaux calculs ; et sur ce point il me semble que la gloire de l’invention est presque uniquement due à Leibnitz, et surtout aux Bernoulli. »


166. Il paraîtrait bien difficile maintenant de quitter la route qui nous a été ouverte par ces illustres géomètres, de se rompre à une nouvelle manière de voir, à une nouvelle notation, à de nouvelles locutions. Lagrange lui-même reconnaît, comme nous l’avons déjà dit (157), que la méthode infinitésimale, telle qu’on l’emploie aujourd’hui, est un moyen sûr d’abréviation et de simplification, et il a cru devoir les adopter dans la nouvelle édition de sa Mécanique analytique, de préférence à ceux qu’il venait de proposer lui-même dans sa Théorie des fonctions analytiques. Il est donc à présumer qu’il n’a considéré ce dernier ouvrage que comme un cadre propre à rassembler sous un même point de vue une multitude d’artifices analytiques qu’il avait découverts dans le cours de ses travaux, et afin d’avoir une occasion de développer méthodiquement les prodigieuses ressources de son génie pour le calcul.


167. J’ai ouï dire plusieurs fois à ce profond penseur que le véritable secret de l’analyse consistait dans l’art de saisir les divers degrés d’indétermination dont la quantité est susceptible ; idée dont je fus toujours pénétré, et qui m’a fait regarder la méthode des indéterminées de Descartes comme le plus important des corollaires de la méthode d’exhaustion.