Page:Carnoy - Littérature orale de la Picardie.djvu/121

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de leur groupe ce fantôme, agitant la tête de mort et disant d’une voix sourde :

— « À genoux ! À genoux ! Priez pour le repos de mon âme ! »

Les fileuses, saisies de terreur, se précipitèrent à genoux sur le sol et firent de grands signes de croix pour éloigner le revenant.

— « Allons, dites cinq Pater et cinq Ave pour mon repos éternel ! continua le spectre, et il commença lentement : Pater noster qui es in cœlis… » Les fileuses dirent les cinq Pater et les cinq Ave demandés et le jeune homme les quitta en murmurant des paroles bizarres auxquelles les bonnes femmes et lui-même ne comprenaient rien, et pour cause.

Minuit était ainsi arrivé et le paysan, fatigué, retourna au cimetière pour y reporter la tête de mort.

Mais avant de la replacer avec les autres ossements, le jeune homme, quelque peu excité par les plaisirs de la soirée, parla à l’oreille du mort et lui dit :

— « Tu m’as procuré beaucoup d’amusement, ce soir ; il est fort juste que je t’en récompense. À rester ici avec tous ces vilains morts, tu dois