Page:Carnoy - Littérature orale de la Picardie.djvu/54

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— « Oh ! si ce n’est que cela, il n’y a rien à craindre pour votre fille. Au contraire, je suis fort heureux de ceci. Ce me sera une excellente occasion de jouer un bon tour au diable. Voici ce qu’il vous faut faire. Votre fille se couchera ce soir comme à l’ordinaire ; rien ne l’empêche même d’aller danser sous les tilleuls de la place avec ses compagnes. Vous placerez une botte de paille déliée près du lit, et, au réveil de votre enfant, vous lui donnerez la paille à lier. Ce sera ce que le diable pourra emporter. Du reste, je serai là avec de l’eau bénite au cas où le démon voudrait se venger d’une façon ou d’une autre du tour qu’on lui aura joué. »

La fermière, rentrée chez elle, se mit en devoir de préparer la botte de paille pour le lendemain matin et raconta à son mari ce qui se passait. Celui-ci s’arrachait les cheveux de désespoir, s’accusant tout haut d’avoir vendu sa fille à Satan, et se promettant bien de se corriger de son avarice.

La jeune fille, rassurée par sa mère, alla danser tout l’après-midi, et le soir venu revint et se coucha comme d’habitude. Mais elle ne put dormir de toute la nuit.