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des missions sauvages du nord des diocèses de Québec et de Montréal, et ils continuent encore aujourd’hui à exercer ce ministère si pénible, mais si glorieux pour leur ordre. Un merveilleux succès est venu couronner leurs travaux évangéliques : pour ne parler que des missions du Saint-Maurice, tous les Têtes-de-Boule et tous les Montagnais sont chrétiens et fervents chrétiens. Il y a des missions très prospères à Coucoucache, à Montachingue et à Kikendache.

Les Sauvages du Saint-Maurice avaient autrefois trois défauts principaux : la jonglerie et la polygamie qui ne se trouvaient que chez un nombre d’individus fort restreint, et la passion pour les boissons alcooliques, qui était beaucoup plus générale. Les deux premiers défauts ont disparu, mais il reste le troisième qui a toujours fait le désespoir des missionnaires. Hélas ! il se trouve toujours des âmes cupides, des êtres qui n’ont d’humain que la figure, pour spéculer sur ce défaut trop connu. On transporte à grands frais dans les neiges du Nord ces boissons tant de fois maudites, et on plonge, sans pitié et sans remords, les naïfs enfants de la forêt dans le vice et la misère. Si les Têtes-de-Boule et les Montagnais n’avaient pas ce défaut, ce seraient des peuples comme on n’en voit plus sur la terre : ces chrétientés seraient trop belles, et il faut croire qu’il n’est pas possible que les églises de la terre ressemblent de si près à l’église du ciel.

Le père Louis Lebret continua glorieusement l’œuvre de ses prédécesseurs, et fut suivi du bon père J. P. Guéguen.

Nous n’essayerons pas de faire l’éloge de tous les ouvriers évangéliques qui ont été envoyés par le supérieur des Oblats sur les bords du Saint-Maurice, mais nous aimons à faire une mention toute spéciale du révérend père Guéguen. C’est que celui-ci, sous l’action de la sainte charité, s’est identifié, plus encore que les autres, avec ses chers Sauvages ; il est devenu véritablement l’un d’entre eux, en prenant leur langage et, au besoin, leurs manières. Heureux le prêtre chez