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d’abord une boutique de menuisiers, élevée par M. Henri Stuart pour l’utilité des Forges. Un petit moulin dont on voit encore les fondations se trouvait à quelques pas d’ici : M. Onésime Héroux devenu propriétaire des deux bâtiments transporta les moulanges dans la boutique, et en fit le moulin actuel qui est beaucoup plus confortable. Trois moulanges y sont en activité.

Le pouvoir d’eau est largement suffisant pour faire marcher le moulin, et je crois sincèrement que l’on a ici le type des pouvoirs d’eau. Pas besoin de batardeau coûteux pour barrer la rivière, pas besoin d’étang pour amasser de l’eau, un simple canal en bois de quelques pieds suffit pour tous les besoins. La quantité d’eau fournie par ce canal est toujours à peu près la même : elle ne diminue pas sensiblement dans les sécheresses de l’été, elle n’augmente presque pas au printemps, de sorte que le moulin marche toujours avec une régularité parfaite.

Et comment se fait-il que la rivière qui coupe le terrain des Forges en deux parties garde le même niveau toute l’année ? N’allez pas avoir recours à de forts calculs pour expliquer cela, car c’est une chose toute simple. 1o La rivière ne prend sa source qu’à trois milles, tout au plus, de son embouchure, de sorte qu’elle n’a pas le temps de rencontrer un grand nombre de ruisseaux qui puissent gonfler son cours. 2o Elle coule au milieu d’un terrain sablonneux qui boit l’eau de la pluie et ne permet pas, le plus souvent, qu’il en arrive une seule goutte jusqu’à elle. 3o Elle prend sa source dans une savane, réservoir inépuisable sur lequel les sécheresses de l’été et la fonte des neiges au printemps ne peuvent pas produire d’effets bien sensibles.

La source étant à peu près toujours la même, il n’est pas surprenant que la rivière qui en découle reste aussi toujours la même.

On avait cru que le déboisement changerait cet état de choses, mais l’expérience prouve inexorablement qu’il n’en est rien.