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Pendant longtemps cette chapelle servit en même temps d’école : une cloison volante séparait au besoin le chœur de la nef, et la nef devenait alors une maison d’école très confortable. Un monsieur Doucet, deux demoiselles Dugal, y ont instruit bien des enfants.

L’intérieur n’est pas riche, mais il est tout propret. Nous trouvons un harmonium près de la porte : c’est presque du luxe, dans une si petite mission. À droite de l’autel il y a une jolie statue de la Sainte Vierge devant laquelle les bons habitants des Forges viennent prier chaque soir du mois de Marie. C’est un exercice qui se fait toujours avec une piété vraiment édifiante. Une image de la Sainte Face domine le tabernacle : n’allez pas, je vous prie, y jeter seulement un regard distrait, car c’est ici l’expression d’une pensée toute sainte.

Les Vieilles Forges étaient autrefois un poste où les voyageurs du Saint-Maurice s’arrêtaient pour boire et blasphémer d’une manière horrible. Celui qui voudrait aujourd’hui rapporter les paroles qui ont été prononcées par ces redoutables passants, serait nécessairement regardé comme un calomniateur, car il y a dans leurs blasphèmes quelque chose d’incroyable. Connaissant cette pénible histoire, M. l’abbé Caisse voulut que la chapelle qui s’élève au milieu des Forges devint la chapelle de la Réparation, et il résolut de la consacrer au culte de la Sainte Face.

Mais il fallait faire encore davantage : Avant que la Sainte Face ne prit possession de son temple, il fallait la porter en triomphe dans toutes les parties du village, affirmer la victoire de Jésus et rendre les chants de bénédiction et de louange plus retentissants et plus solennels que les blasphèmes ne l’avaient jamais été. On organisa donc une grande fête pour le 15 juillet 1883. Tout le peuple contribuait aux préparatifs avec un véritable enthousiasme. « On fit si bien, dit le missionnaire lui-même, qu’au jour venu le modeste sanctuaire des Forges se trouva tout à fait transformé. Le voilà devenu beau, on le reconnaît à peine ! Et cependant, qu’y a-t-il ? Verdure de la forêt, fleurs du jardin, modestes draperies rassemblées