Page:Caron - Deux voyages sur le Saint-Maurice, 1889.djvu/267

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 265 —

et les traiter le plus humainement possible. Lorsque cet ordre arriva, il en faisait mener dans dix voitures soixante qui s’étaient rendus d’eux-mêmes. Le lendemain, ses chercheurs et chasseurs en trouvèrent soixante-dix ; il fit donner à manger à ces prisonniers et les envoya aux Trois-Rivières. Son Excellence le général Carleton approuva sa conduite, et le général américain Smith le remercia de son humanité.

La veille du jour que l’action se donna, Pélissier ayant eu avis du grand vicaire Saint-Onge que Son Excellence ne serait pas charmée de le rencontrer sur son passage, se trouva si épouvanté qu’il monta en canot et se fit mener secrètement par deux hommes à Sorel. Laterrière demeura donc seul à la tête de l’établissement.

Lorsque le général Carleton vit M. Laterrière la conversation suivante s’engagea : — « Pélissier est donc parti ? — Oui, mon gouverneur. — Qu’est-ce qui l’a fait quitter ainsi sa famille et les forges ? — Autant que je puis le savoir, c’est un billet du grand vicaire Saint-Onge, à qui il paraissait que Votre Excellence avait ordonné de l’avertir de ne pas se trouver sur son passage. — Cela, fit le gouverneur, ne voulait pas dire de tout abandonner pour aller rejoindre ouvertement l’ennemi. S’il était resté paisiblement chez lui et m’avait écrit un mot de justification, cela aurait suffi. — Il craignit la malice des faux délateurs, dont il connaît le venin. — Tout cela ne lui eût pas ôté un cheveu, et je suis fâché de sa folie. Eh ! quel mal vous arrive-t-il à vous et aux autres officiers de ces forges ? — Aucun, mon général. Nous sommes prêts à vous obéir à votre premier ordre — Continuez de soutenir cet atelier dans toute son activité pour les besoins et le bien de la Province, de l’État, c’est là tout ce que j’exige à présent de vous. »

M. Laterrière le remercia, et le pria de continuer à protéger les officiers des Forges. Avant de partir des Trois-Rivière, le général voulut bien visiter les Forges, accompagné de tout son état-major, et il n’eut que des compliments à adresser au nouveau directeur.